Historique d’Enfants Réfugiés du Monde.
ERM est une ONG française créée en 1981 par des psychologues professionnels rejoints par des travailleurs sociaux. ERM est présent à travers le monde, en particulier au Proche-Orient, au Liban depuis 1982, à Gaza depuis 1988 et en Cisjordanie depuis février 2005. Leur présence auprès des réfugiés palestiniens s’explique par le fait que la moitié des réfugiés dans le monde est constituée de Palestiniens. Par rapport à tous les autres réfugiés, les Palestiniens ont une spécificité : ils sont réfugiés depuis 3 voire 4 générations. En Palestine, le partenaire principal est l’UNWRA(organisme de l’ONU pour les réfugiés).
ERM a son siège à Jérusalem, une condition nécessaire pour être reconnue par les Israéliens ; cette ONG est également reconnue par les Palestiniens.
Pour l’année 2005, son financement est assuré pour 65% par l’UE ( à la porte d’entrée des locaux d’ERM, il y a un autocollant de l’UE), pour 25% par la France via le Ministère des Affaires étrangères et pour 10% des fonds propres (dons, adhésions,...).
A Gaza, ERM a débuté en 1988 par la formation d’une équipe de kinésithérapeutes soignant des enfants handicapés lors de la 1ère intifada ; l’ONG s’est ensuite orientée vers la création d’un institut de formation aux pédagogies nouvelles, comparable au CEMEA en France. Un consortium de 6 ONG françaises ( dont ERM, Franca, CEMEA, Léo Lagrange...) s’est constitué pour travailler avec une ONG palestinienne « l’Institut Canaan » qui s’autofinance actuellement à 80% . En effet, dans la philosophie d’ERM, chaque association aidée doit pouvoir continuer seule.
Par ailleurs, à Gaza, en 1994, la même démarche a été suivie pour soutenir des centres d’animation qui emploient actuellement une centaine de personnes.
Une équipe régionale pour le Proche-Orient a été mise en place, composée de 3 personnes :
– 1 coordinatrice
– 1 administrative
– 1 traducteur : arabe, hébreu, français, anglais.
Le concept du projet.
Le jeu libre, c’est-à-dire le jeu créatif et surtout non commercial, est conçu comme une méthode thérapeutique, sur le mode de ce qu’a proposé Piaget.
Dans chaque centre d’animation, il y a des ludothèques fondées sur 4 thèmes selon les capacités intellectuelles de l’enfant :
les jeux d’exercices pour les tout petits ; ils sont rarement utilisés dans la mesure où les plus jeunes qui fréquentent les centres ont 6-7 ans.
Les jeux symboliques consistant à jouer un rôle et destiné à se projeter dans l’avenir, à évacuer le stress de l’enfant ; par exemple, dans un centre, l’équipe a eu comme idée de reconstruire l’univers quotidien de l’enfant ( la maison, la classe, le marché, l’hôpital...) ; ceci a permis d’impliquer les parents dans la construction de cette installation.
Les jeux d’assemblage, à partir de 4 ans.
Les jeux de règles, à partir de 8 ans.
La formation des animateurs.
Ils sont recrutés sur un profil de poste. Certains seront des animateurs « de passage », pour 3 ou 4 ans : ce sont des étudiants en psychologie, en éducation, en développement social. Les autres, recrutés au niveau bac, en feront leur métier.
Tous suivent pendant 18 mois une formation en alternance dans laquelle 4 compétences sont développées :
la pédagogie et les relations humaines.
La connaissance de l’environnement social, ici de la société palestinienne, de ses enjeux politiques...
La formation à la gestion administrative et à l’organisation.
Les techniques d’animation.
La mise en place du projet en Cisjordanie.
L’équipe en place :
6 personnes ont comme point d’attache le bureau de Ramallah :
– Jack NENO, le coordinateur pour la Cisjordanie
– Khalid NASEEF, le pédagogue
– Inas RAFIDI, la psychologue
– Linda BANNOURAH, l’animatrice du réseau
– Dina JIBRIL, l’ administratrice chargée de la gestion, de la comptabilité et du contrôle des règles imposées par les financeurs ( UE et France).
Par exemple, l’UE interdit à ERM d’acheter des produits israéliens, ce qui pose un problème pour l’achat de la pâte à modeler car il n’y a pas de pâte à modeler palestinienne.
12 personnes travaillent comme animateurs dans les centres. Ce sont des « bénévoles indemnisés » à hauteur de 300 à 400 dollars ; ils ont la sécurité sociale locale et touchent un 13ème et 14ème mois leur permettant de se constituer une retraite.
Depuis septembre 2005, ces animateurs ont eu la formation suivante :
– une formation générale théorique, d’une durée de 9 jours, pour aborder les thèmes suivants : le projet institutionnel, l’élaboration d’un projet pédagogique...il s’agit de transmettre des savoir faire.
– l’apprentissage de techniques d’animation ( BASE/BAFA et BFD en France) dans le cadre d’un projet s’inscrivant dans le projet pédagogique et institutionnel.
En décembre 2005, une rencontre avec une psycho-clinicienne ayant une grande expérience, notamment en Guinée et une « ludologue », responsable d’une ludothèque à St Denis, spécialiste des jeux à des fins thérapeutiques.
Les 3 objectifs d’ERM en Cisjordanie.
Le soutien de centres préexistants mais qui ont d’énormes difficultés à fonctionner par manque de moyens et d’animateurs formés ; ERM leur apporte un soutien financier, technique, psychologique...
la mise en place de 2 centres dans 2 camps de réfugiés où travaillent les 12 animateurs recrutés : il s’agit du camp de Jalazon ( à 5Km au Nord de Ramallah) et du camp de Shu’fat, à Jérusalem.
Le partenariat : un atelier a été ouvert entre 23 ONG internationales et surtout palestiniennes pour travailler ensemble sur la violence faite aux enfants et sur les droits des enfants. Il s’agit d’un programme sur 2 ans, transversal, chaque ONG apportant sa compétence ( aspect juridique, comment réduire la violence, comment prévenir la violence, comment soigner la violence...) Les ONG veulent aboutir à l’élaboration d’une plaquette et à une campagne spécifique sur la violence faite aux enfants.
Il s’agit d’une démarche totalement nouvelle : ces ONG acceptent de travailler ensemble, même s’il n’y a pas d’argent.
Dans ce réseau, on a fait le choix de ne pas travailler avec les ONG qui ont signé le texte assimilant la résistance palestinienne au terrorisme. Naturellement, ERM est pour le droit au retour des réfugiés palestiniens.
Les problèmes de fonctionnement liés à la situation politique.
Jack NENO habite Bethléem dont il est originaire ; pour venir travailler à Ramallah, il doit faire 60 Km sur une route extrêmement dangereuse, surtout la nuit, pour contourner Jérusalem alors qu’avant l’intifada, la distance était de 25 km par la route normale ; il s’est résolu à rester à Ramallah la semaine et il ne rentre à Bethléem que le WE.
Pour que les équipes puissent circuler pour leur travail, il est nécessaire qu’ERM travaille en coordination avec l’armée ; cette coordination ne résout pas tous les problèmes ; la dernière fois que Jack est allé à Gaza, grâce à la coordination il a eu une autorisation pour entrer ; il a quand même attendu 3H.
Questions.
Les enfants viennent-ils facilement aux centres ? quelle est l’attitude des parents ?
Les parents apprécient. Parfois, on rencontre quelques problèmes ; par exemple, quelques parents étaient mécontents de la mixité ; nous avons donc fait beaucoup de communication avec eux. D’une façon générale, pour bien travailler avec des enfants, il faut travailler à tous les niveaux : avec les parents, les professeurs, les travailleurs sociaux.
Il est très important de communiquer. Certaines violences sont au moins dites, par exemple l’inceste, les abus sexuels, l’humiliation, la négligence. Des jeunes filles ont pu dire que les mariages précoces étaient une violence.
Les enfants palestiniens souffrent-ils plus de la violence de l’occupation ou de la violence de la société palestinienne ?
En Palestine, il y a 3 types de violence :
– la violence de l’occupation qui ne touche pas toutes les régions avec la même intensité.
– laviolence à l’école.
– la violence dans la famille.
ERM a choisi de travailler sur les violences sur lesquelles il est possible de changer quelque chose ; la violence qui affecte le plus l’enfant, c’est celle qu’il vit au sein de sa famille et à l’école ; il est possible d’ agir avec les Palestiniens sur la violence dans la société palestinienne .
On peut remarquer que le niveau de violence est variable en fonction de la proximité israélienne. A Jalazon, le niveau de violence reste dans des limites « acceptables » ; à Shu’fat, la violence a atteint un niveau effrayant, notamment avec la drogue et la prostitution.
Il y a aussi la violence créée par l’institution : par exemple, quand il y a 2 robinets pour 500 enfants, il y a forcément violence.
En guise de conclusion, nous laissons à votre appréciation la devise d’Enfants Réfugiés du Monde, qui d’ailleurs a évolué.
Il y a d’abord eu « Un enfant qui ne joue pas est un enfant qui meurt »
Et maintenant « un enfant qui joue est un enfant qui vit ».